Dans le contexte de la pandémie de la COVID-19, après avoir pris la décision de fermer les écoles durant près de deux mois, le gouvernement a décrété la réouverture des écoles primaires à compter du 11 mai 2020 pour l’ensemble du Québec, à l’exception de la région métropolitaine de Montréal. Le retour en classe des enfants n’est alors pas obligatoire, mais plutôt soumis à la discrétion des parents. Suivant leur situation, entre leur état de santé et les difficultés scolaires de leurs enfants, ceux-ci peuvent alors faire face à un important dilemme.
Il est tout d’abord important de souligner que la décision du retour d’un enfant en classe, suivant la réouverture des écoles en temps de pandémie, relève de l’autorité parentale et doit donc être prise de concert par les deux parents. Ils peuvent alors, d’un commun accord, décider que leurs enfants continuent d’effectuer leur scolarisation de la maison s’ils jugent que c’est l’option la plus appropriée à leur situation. Les parents doivent alors prendre les moyens nécessaires pour permettre la mise en place de l’encadrement pédagogique à distance.
Lorsque les parents sont séparés, ils doivent, dans la mesure du possible, tenter d’éviter de modifier les modalités de garde applicables. Ainsi, si seul un des parents est en mesure d’effectuer l’enseignement à domicile, il sera alors probablement préférable d’envoyer les enfants à l’école. Il en est de même dans la situation où les enfants présentent des difficultés scolaires, leur retour sur les bancs d’école étant alors également favorisé.
Inversement, si un enfant ou un membre de la famille présente une vulnérabilité au niveau de la santé, il pourrait s’avérer nécessaire de maintenir les enfants à la maison. Ainsi, chaque décision est un cas d’espèce et les parents doivent donc juger selon leur réalité qui leur est propre.
En cas de divergence d’opinion entre les parents quant à l’opportunité de permettre le retour en classe de leurs enfants, les tribunaux seront alors appelés à trancher la question.
Le juge se prononcera alors en fonction de ce qui apparaît être dans le meilleur intérêt de l’enfant, suivant la situation particulière de celui-ci et ses caractéristiques personnelles. Notamment, son âge, sa condition de santé, son milieu familial, ses besoins moraux, intellectuels et éducatifs seront pris en considération.
Depuis le début de la pandémie, les tribunaux ont déjà été appelés à trancher la question à plus d’une reprise, se prononçant alors en faveur ou à l’encontre du retour en classe d’un enfant dépendamment des cas.
En date du 7 mai 2020, l’honorable Claude Villeneuve, J.C.S., a rendu deux décisions ordonnant le retour d’enfants à l’école à compter de la réouverture du 11 mai 2020. Dans lesdits cas présentés au juge, les enfants étaient âgés entre 7 et 11 ans, certains d’entre eux étaient en situation de difficultés scolaires, d’autres demandaient d’être autorisés à retourner en classe afin de se préparer pour l’entrée au secondaire. Il est important de souligner qu’aucun des enfants, ni les membres de leur famille, ne présentaient une condition de santé particulièrement préoccupantes eu égard à la COVID-19.
Le juge Villeneuve a alors fondé sa décision en faveur du retour en classe sur quatre (4) motifs :
Dans sa décision rendue le 8 mai 2020, l’honorable Lise Bergeron, J.C.S., s’est rangée du même avis et a ordonné le retour à l’école d’un enfant âgé de 12 ans, fréquentant la 6e année du primaire et présentant une situation d’échec scolaire.
Afin de s’opposer à un tel retour en classe, le père de l’enfant alléguait que cela priverait celui-ci de contacts avec sa grand-mère qui occupe l’appartement au-dessus du sien et qui s’occupe de lui en son absence, le père étant camionneur. Par le fait même, le père craignait que le retour de l’enfant à l’école fasse obstacle au maintien de la garde partagée.
Dans cette situation, l’enfant ne présentait pas une condition de santé qui le rendrait plus à risque que les autres. La juge a alors considéré que les motifs allégués par le père étaient insuffisants pour justifier que l’enfant soit privé de l’opportunité de maintenir et d’améliorer ses acquis en bénéficiant du soutien scolaire le plus optimal possible.
CAS D’ILLUSTRATION – CONJOINTE AVEC PROBLÈME DE SANTÉ ET ENFANT À LA MATERNELLE
Le 7 mai 2020, suivant le désaccord des parents quant au retour à l’école de leur enfant de 6 ans, l’honorable Claudia P. Prémont, J.C.S., a prononcé une ordonnance à l’encontre de la fréquentation scolaire pour la terminaison de la présente année scolaire.
Dans cette affaire, la conjointe du père souffrait d’une maladie auto-immune et l’enfant, étant à l’âge de la maternelle, ne présentait aucune difficulté scolaire et de socialisation. Considérant l’âge de l’enfant et le fait qu’un retour à l’école le couperait temporairement de ses accès avec son père et sa demi-fratrie, eu égard à la situation, la juge décida de favoriser la qualité et stabilité de sa relation avec son milieu maternel et paternel.
Une décision similaire fut également rendue le 8 mai 2020 par la juge Prémont dans un contexte où les modalités de garde partagée étaient en place, où l’enfant était âgé de 6 ans et n’était pas en situation d’échec scolaire et où la mère présentait un état de santé plus à risque par rapport à la COVID-19. La juge ordonna alors que l’enfant ne fréquente pas l’établissement scolaire jusqu’à la fin du mois de juin 2020.
Il est donc à noter que la fragilité de l’enfant et des membres de son unité familiale face à la COVID-19 ainsi que les difficultés scolaires et sociales de l’enfant sont deux éléments majeurs qui sont mis en balance par les tribunaux au moment de trancher la question de la fréquentation scolaire.
Cette question d’actualité étant susceptible de faire l’objet de débats ultérieurs, de faire intervenir d’autres facteurs et d’évoluer suivant l’adoption de nouvelles mesures gouvernementales, il est important de demeurer bien informé. Vous avez des questions quant à votre situation particulière? Demandez qu’un avocat en droit de la famille vous appelle!
N. B. : Cet article dégage les principes généraux du droit québécois et ne constitue pas un avis ou un conseil juridique. Chaque situation étant différente et le droit étant porté à évoluer, vous êtes invité à contacter votre conseiller juridique afin de connaître les règles particulières propres à votre situation.