Vous êtes un employeur et vous entrevoyez la reprise de vos activités suivant les nouvelles directives du gouvernement québécois et, par le fait même, le rappel de vos employés au travail? Sachez qu’il importe plus que jamais de bien vous préparer et surtout d’être bien informé quant à vos droits et à vos obligations à titre d’employeur.
En effet, un manque de prévoyance de votre part pourrait vous coûter cher. Devant les risques de propagation de la COVID-19, il est raisonnable de croire que plusieurs employés auront des appréhensions quant à leur retour au travail et certains même refuseront d’y retourner.
Le présent article vous permettra de bien connaître vos obligations en matière de santé et de sécurité au travail, mais surtout de bien comprendre l’étendue du droit de refus d’un travailleur en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST).
Votre principale obligation à titre d’employeur en matière de santé et de sécurité au travail est de « prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique du travailleur » (art. 51 LSST).
Ainsi, avant la réouverture de votre entreprise, il est de votre obligation de mettre en place des mesures sanitaires nécessaires à la protection de vos travailleurs, par exemple :
De son côté, le travailleur a droit, en vertu de la LSST, de refuser d’exécuter un travail s’il a des motifs raisonnables de croire que l’exécution de ce travail l’expose à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ou peut avoir l’effet d’exposer une autre personne à un semblable danger.
Le travailleur ne peut cependant exercer le droit que lui reconnaît la loi si le refus d’exécuter ce travail met en péril immédiat la vie, la santé, la sécurité ou l’intégrité physique d’une autre personne ou si les conditions d’exécution de ce travail sont considérées comme normales pour le genre de travail qu’il exerce. On peut donc en déduire que les travailleurs du milieu de la santé pourraient difficilement se prévaloir avec succès d’un tel droit de refus.
La LSST permet à un « travailleur » d’exercer le droit de refus.
Un gérant, un surintendant, un contremaître ou un représentant de l’employeur dans ses relations avec les travailleurs ne pourront donc pas se prévaloir de ce droit. Il faut toutefois savoir que d’autres dispositions législatives protègent ces individus.
Tout dépend de la situation. Il est important de noter que la loi n’exige pas que le danger soit réel, mais plutôt que le travailleur ait des motifs raisonnables de croire à son existence en se fondant sur des critères objectifs et non purement subjectifs, afin de justifier son refus. Ainsi, il ne pourrait s’agir d’un simple prétexte pour éviter le retour au travail par exemple.
Par ailleurs, la condition personnelle du travailleur ne peut justifier le droit de refus si les conditions d’exécution de son travail s’avèrent normales. Toutefois, en situation de pandémie, il est raisonnable de penser que, pour l’ensemble des secteurs d’activités, les conditions d’exécution du travail peuvent être qualifiées d’« anormales » au sens de la LSST.
Ainsi, à l’ère de la COVID-19, un milieu de travail mésadapté à la pandémie pourrait justifier le droit d’un travailleur de refuser d’exécuter son travail. Chaque cas étant différent, il est fortement recommandé d’obtenir l’avis de votre conseiller juridique afin de déterminer l’application du droit à votre situation particulière.
Pour exercer valablement son droit de refus, le travailleur doit aviser aussitôt son supérieur immédiat, son employeur ou un représentant de celui-ci.
Ces derniers convoqueront alors le représentant des travailleurs à la prévention ou, à défaut, un représentant syndical ou encore un autre travailleur désigné qui procédera à l’examen de la situation.
Un inspecteur de la CNESST pourrait être ultimement appelé à intervenir en présence d’un danger réel ou si le travailleur persiste dans son refus d’exécuter le travail en l’absence d’un tel danger. Suivant son analyse, cet inspecteur pourra alors exiger au travailleur de reprendre son travail ou encore prescrire à l’employeur les mesures de correction nécessaires.
Jusqu’à ce qu’une décision soit prise par le représentant du travailleur ou par l’inspecteur de la CNESST, l’exécution de ce travail est suspendue et l’employeur ne pourra pas le faire exécuter par un autre travailleur. Au surplus, le travailleur sera réputé être au travail et devra donc être rémunéré, de même que tout travailleur affecté par le droit de refus.
Lorsque le représentant du travailleur conclut qu’il n’y a pas de danger ou encore lorsque ce représentant ou l’inspecteur de la CNESST conclut que ce danger est inhérent à la condition personnelle du travailleur, l’employeur sera justifié de faire exécuter le travail par un autre employé.
Néanmoins, il sera possible pour l’employeur d’obliger le travailleur qui a exercé son droit de refus à demeurer disponible sur les lieux du travail et également l’assigner temporairement à une autre tâche qu’il est raisonnablement en mesure d’accomplir ou encore de l’obliger.
Vous seriez autorisé à sévir contre le travailleur, voire en arriver à un congédiement, si son refus était manifestement déraisonnable ou encore empreint de mauvaise foi. Il serait également possible de sanctionner le représentant du travailleur qui a agi abusivement dans le cadre des fonctions que lui attribue la LSST. Toutefois, la sanction ne doit pas être prématurée et ne doit survenir qu’après une décision finale de l’inspecteur de la CNESST ou encore du Tribunal administratif du travail.
Cela étant dit, le travailleur bénéficie d’une protection législative contre toute sanction imposée en raison de l’exercice d’un droit accordé par la LSST. Les sanctions disciplinaires en matière d’exercice du droit de refus sont donc délicates et méritent l’attention de votre conseiller juridique afin de vous éviter bien des soucis. À cet effet, demandez qu’un avocat de notre équipe vous appelle!
N. B. : Cet article dégage les principes généraux du droit québécois et ne constitue pas un avis ou un conseil juridique. Chaque situation étant différente et le droit étant porté à évoluer, vous êtes invité à contacter votre conseiller juridique afin de connaître les règles particulières propres à votre situation.